Etape 7 : la dernière cuisson et la résultat !
La cuisson haute température : l'aboutissement de cinq semaines de création
Nous y voilà. Après la préparation de la terre, le tournage, le séchage, le tournassage, la cuisson biscuit et l'émaillage, mes pièces sont prêtes pour leur baptême final : la cuisson haute température. Dans mon atelier Pot et Tess à Aubenas, ce moment marque l'aboutissement de cinq à six semaines de travail patient. C'est l'instant de vérité où je découvre enfin le résultat de toutes ces étapes.
La cuisson haute température du grès
Pourquoi monter si haut en température
Pour la cuisson du grès, je cuis à 1260°C, parfois jusqu'à 1280°C selon les pièces et les émaux. À cette température extrême, la magie opère : le grès se vitrifie, devient complètement imperméable et d'une solidité exceptionnelle. Les émaux fondent, se transforment en une surface lisse et brillante, ou mate selon mes recettes.
C'est cette haute température qui différencie le grès de la faïence ou de la terre cuite. Mes pièces deviennent extrêmement résistantes, peuvent aller au lave-vaisselle, au micro-ondes, supporter les chocs thermiques. C'est de la vaisselle pour la vie, pas de la décoration fragile.
Mon four et son fonctionnement
Mon four électrique est le cœur battant de mon atelier. C'est un investissement important, mais indispensable. Il est programmable, ce qui me permet de contrôler précisément les montées et descentes de température. Les résistances chauffent l'intérieur jusqu'à des températures infernales, tout en restant parfaitement isolé à l'extérieur.
J'ai appris à connaître mon four, je sais qu'il y a des zones plus chaudes que d'autres. Je sais où placer mes pièces selon l'effet que je recherche. Certains émaux aiment le haut du four, d'autres préfèrent le bas. C'est une connaissance qui s'acquiert au fil des cuissons.
L'enfournement de la cuisson finale
Un puzzle délicat et stratégique
L'enfournement pour la cuisson haute température est bien plus délicat que pour le biscuit. Cette fois, mes pièces sont émaillées et ne doivent surtout pas se toucher. Si deux surfaces émaillées se touchent, elles vont coller définitivement l'une à l'autre.
Je place donc chaque bol, chaque tasse, chaque assiette avec un espace suffisant autour. Je ne peux plus empiler, je ne peux plus optimiser autant qu'au biscuit. Un enfournement peut me prendre une heure, parfois deux pour les grandes fournées. Je réfléchis, j'ajuste, je mesure les espaces.
Les cales et les pernettes
Pour les assiettes et les pièces plates, j'utilise des pernettes, ces petits trépieds en céramique réfractaire. Ils soulèvent légèrement la pièce et évitent qu'elle ne colle à la plaque si jamais l'émail coule un peu. Après la cuisson, je retire les pernettes et je ponce les petites marques qu'elles laissent.
Je vérifie une dernière fois que tous les pieds sont bien propres, sans trace d'émail. Je vérifie que mes empilages de plaques sont stables. Et puis je ferme le couvercle du four, je lance le programme, et commence l'attente.
Le cycle de cuisson : 20 heures de tension
La montée progressive vers 1260°C
La montée en température est longue et progressive. Je commence doucement, environ 100°C par heure au début. Vers 600°C, comme pour le biscuit, il y a cette transformation du quartz qu'il faut respecter. Je ralentis un peu la montée à ce moment-là.
Ensuite, je peux accélérer jusqu'à 1000°C. Puis je ralentis à nouveau pour les derniers 260°C. C'est dans cette phase finale que les émaux commencent à fondre, à se transformer. Je fais un palier d'une heure à 1260°C pour que tout s'homogénéise bien.
La descente : la plus longue attente
Après le palier, je coupe le four et je le laisse refroidir naturellement. C'est la partie la plus difficile pour moi : l'attente. Le four met presque 24 heures à redescendre à température ambiante. Je ne dois surtout pas l'ouvrir avant, sinon le choc thermique pourrait fissurer toutes mes pièces.
Je passe devant le four plusieurs fois dans la journée, je pose ma main sur le four pour sentir la chaleur qui diminue progressivement. Vers 80°C, je peux entrouvrir légèrement pour accélérer un peu la fin du refroidissement. Mais je reste patiente. Après cinq semaines de travail, je peux bien attendre quelques heures de plus.
L'ouverture du four : le grand dévoilement
L'émotion de la découverte
L'ouverture du four après une cuisson haute température reste un moment d'émotion intense. J'ouvre la porte, et la première chose qui me frappe, c'est la lumière. Les émaux brillent, reflètent la lumière du jour. Les couleurs ont changé, se sont révélées.
Mon cœur bat toujours un peu plus vite. Est-ce que tout a bien cuit ? Est-ce que mes émaux ont donné le résultat espéré ? Est-ce qu'il y a eu des coulures, des défauts, des fissures ? Je commence à sortir les pièces une par une, délicatement, même si elles ne sont plus fragiles.
Les transformations et les surprises
C'est toujours fascinant de voir comment les émaux se sont transformés. Un émail qui était rose pâle avant cuisson devient un beige crémeux profond. Un gris bleuté devient céladon. Les superpositions d'émaux ont créé des effets que je n'avais qu'imaginés. Parfois c'est encore plus beau que prévu, parfois c'est différent.
Il y a toujours quelques surprises. Une coulure plus marquée que prévu, mais qui finalement donne du caractère à la pièce. Un effet de texture inattendu. Ces accidents contrôlés font partie de mon travail artisanal. Chaque pièce Pot et Tess porte en elle cette part d'imprévu qui la rend unique.
Le tri et les finitions post-cuisson
Évaluer la qualité de chaque pièce
Une fois toutes les pièces sorties, je les examine une par une. Je vérifie qu'il n'y a pas de défauts majeurs : fissures, émaux trop fins laissant voir le biscuit, bulles dans l'émail. Je passe ma main sur chaque surface pour sentir la douceur, la régularité.
Je ponce les pieds avec du papier de verre pour qu'ils soient parfaitement lisses et ne rayent pas les tables. J'enlève les traces des pernettes si j'en ai utilisées. C'est un travail minutieux mais essentiel. Une pièce sortie du four n'est pas encore tout à fait terminée.
Les pièces qui ne passent pas mes critères
Je suis exigeante sur la qualité. Certaines pièces ne passeront pas mes critères de vente, même si elles sont techniquement utilisables. Un défaut d'émail trop visible, une déformation légère, un éclat. Ces pièces rejoignent mon stock personnel ou sont offertes à des proches en expliquant le petit défaut.
Je ne vends que ce qui me satisfait pleinement. C'est ma réputation qui est en jeu à chaque pièce qui sort de l'atelier. Quand vous achetez un bol ou une tasse Pot et Tess, vous pouvez être sûr qu'elle a passé mon contrôle qualité rigoureux.
Cinq à six semaines de la terre à l'objet fini
Récapitulatif du parcours d'une pièce
Quand je pose devant moi une tasse tout juste sortie du four, je repense au chemin parcouru. Il y a cinq à six semaines, ce n'était qu'une motte de grès brut. J'ai pétri cette terre, je l'ai centrée sur mon tour, j'ai monté les parois avec mes mains. Elle a séché lentement, je l'ai retournée pour le tournassage, j'ai sculpté son pied.
Elle est passée par le feu une première fois pour le biscuit. Je l'ai plongée dans mon émail sans plomb que j'ai formulé et préparé. Et puis elle est retournée dans le four, pour cette transformation finale à 1280°C. Cinq à six semaines de gestes précis, d'attentes, de transformations successives.
Le temps long de l'artisanat
Dans notre monde où tout va vite, où on peut commander un objet et le recevoir le lendemain, mes céramiques incarnent un autre rapport au temps. Le temps long de l'artisanat, le temps de la maturation, le temps nécessaire pour que chaque étape s'accomplisse à son rythme.
Ce temps long donne sa valeur à chaque pièce. Quand vous buvez votre café dans une tasse Pot et Tess, vous tenez entre vos mains cinq semaines de savoir-faire, de patience, de passion. Vous tenez un peu de l'Ardèche, de mon atelier d'Aubenas, de mes mains dans la terre.
La satisfaction du travail accompli
Quand je photographie mes nouvelles créations, quand je les dispose sur les étagères de l'atelier en attendant qu'elles rejoignent leur futur propriétaire, je ressens toujours cette même satisfaction. Celle du travail accompli, de la matière transformée, de l'utile rendu beau.
Chaque ouverture de four est un peu comme une naissance. Ces pièces qui n'existaient pas il y a quelques semaines sont maintenant prêtes à entrer dans votre quotidien, à accompagner vos petits-déjeuners, vos thés de l'après-midi, vos dîners entre amis. Elles vont porter vos aliments, tenir entre vos mains, devenir des objets familiers de votre vie.
Le cycle recommence
Et déjà, sur ma table de travail, de nouvelles mottes de grès attendent d'être pétries. Le cycle de création recommence, inlassablement. C'est ça aussi, le métier de céramiste : recommencer chaque jour avec la même passion, créer pièce après pièce, cuisson après cuisson, un univers de formes et de couleurs.
Potière à Aubenas en Ardèche, je crée des céramiques en grès entièrement faites main dans mon atelier. De la préparation de la terre à la cuisson finale à 1260°C, chaque pièce Pot et Tess demande cinq à six semaines de travail artisanal. Découvrez toutes les étapes de création sur le blog de mon atelier.


